Hélène Pierucci : le cuir, une passion d’enfance

Hélène Pierucci n’a pas toujours travaillé dans son atelier de cuir. Sa première partie de carrière, elle l’a passée dans la formation. Mais un jour, sa passion pour cette matière noble, découverte à l’âge de 12 ans, a refait surface.

Aujourd’hui, l’ancienne cadre supérieure dans la gestion d’entreprise se consacre à sa passion du cuir.
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Difficile de dire d’où est originaire Hélène Pierucci « Mes deux parents étaient éducateurs spécialisés. Quand j’étais enfant, nous bougions au gré de leurs mutations ! », introduit la fondatrice de l’atelier de maroquinerie Po !, installé à Suresnes (92).

C’est pourtant grâce au travail de son père que cette artisane a découvert le cuir, vers l’âge de 12 ans. « Papa était directeur d’un centre d’accueil de jour ouvert. Plusieurs profs proposaient aux jeunes de découvrir leurs métiers. Parmi ceux-ci, il y avait un maroquiniste. Comme nous habitions en rase campagne, j’allais passer certains mercredis après-midis dans son atelier. Ça sentait bon ! Je l’aidais à découper des pièces et je fabriquais de petits objets. Puis le cuir m’a quittée. A moins que ce ne soit moi qui aie quitté le cuir… ? », s’interroge-t-elle.

De toute manière, Hélène est bonne élève. Il est inenvisageable qu’elle entreprenne un cursus manuel. Aussi, après une expérience de deux mois dans un atelier de restauration de tapisseries anciennes en fin de seconde, intègre-t-elle une première scientifique. Après le Bac, faute de savoir quelle orientation choisir, Hélène Pierucci s’inscrit un peu partout. Manque de chance, elle est prise partout ! « J’ai décidé d’aller en informatique. Je pensais que ça me servirait toujours. Mais après avoir décroché mon diplôme d’analyste programmeur, j’ai bifurqué vers une fac d'éco et de gestion d’entreprise. Ma formation est globalement financière », synthétise-t-elle.

Contrairement à beaucoup de “reconvertis” qui ont pâti de leur première partie de carrière, Hélène Pierucci déclare avoir « plutôt bien vécu » la sienne. « J’ai travaillé dans la formation professionnelle, un domaine d’activité que j’aimais beaucoup car il s’agissait d’amener des jeunes d’un point A à un point B. Je ne fais pas partie de ceux qui ont souffert de perte de sens ! », insiste-t-elle. Alors, qu’est-ce qui a fini par pêcher ? Grimper toujours plus haut. « Plus je progressais, plus je m’éloignais du cœur de l’activité qui m’animait », témoigne cette entrepreneuse.

Seul hic : lorsqu’ Hélène est envahie par le besoin de raccrocher les gants, il lui reste encore 20 années de labeur à tirer ! Tandis qu’elle s’interroge sur son futur, l’une de ses amies décide de se reconvertir. C’est l’impulsion dont elle a besoin pour oser changer de voie. Oui, mais laquelle ? C’est à ce moment-là que le cuir refait surface… Comme par magie ! Quelques recherches permettent à la quadragénaire de constater qu’il existe plusieurs CAP accueillant des adultes et que les recrutements sont réguliers. Il n’en faut pas plus pour la décider.

Hélène, toutefois, garde la tête froide. Si elle conserve un excellent souvenir des « ateliers cuir de son enfance », elle ignore si elle supportera les cadences imposées par les chefs d’atelier. L’avenir ne le dira jamais ! Son CV d’ancienne cadre supérieure dans la gestion d’entreprise fait peur. « Finalement, ça m’a arrangée. Je me suis dit : “puisqu'ils ne veulent pas de moi, je vais créer mon emploi !” », sourit-elle.

C’est ainsi qu’est né Po, en 2016. Huit ans plus tard, l’artisane maroquiniste s’épanouit dans son atelier scindé en trois activités : création, sous-traitance et réparation. « Aucune journée ne se ressemble. Le lundi, je peux restaurer une pièce en cuir, le mardi travailler avec un styliste sur un prototype d’accessoire de mode et le vendredi fabriquer une pochette de téléphone mobile hors-norme », illustre-t-elle.

Si elle reste passionnée par son travail, Hélène Pierucci est toutefois heureuse que son métier ait fini par reprendre sa juste place. « Certes, je ne vois pas les heures passer. Toutefois, je suis heureuse de rentrer chez moi le soir et de partir en vacances, nuance cette maroquiniste. C’est très sain car cela permet de rester vigilant à ce que le travail n’empiète pas sur la sphère personnelle et qu’il soit économiquement viable. Sinon ce n’est plus un métier… C’est un hobbie ! »

Par Sandra Franrenet